La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (Loi « Climat et Résilience ») a été publiée au Journal officiel ce matin. Inspirée des 146 propositions de la Convention citoyenne pour le climat retenues par le président de la République Emmanuel Macron, cette loi doit permettre à la France de progresser dans l'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) d'ici 2030 puis de neutralité carbone en 2050, afin d'atteindre les objectifs fixés par l'Accord de Paris du 12 décembre 2015 et du Pacte Vert pour l'Europe (V. Pacte vert pour l'Europe : la Commission présente 12 textes pour parvenir à l'objectif "Fit for 55").Un rectificatif au Journal officiel du 24 août 2021 est publié au JO du 4 septembre : Au second tiret au a du 2° du II de l'article 35, au lieu de : « “Il est rendu public notamment par une mise en ligne sur le site internet, lorsqu'il existe, des pouvoirs adjudicateurs et entités adjudicatrices mentionnées au premier alinéa.” ; », lire : « “Il est rendu public notamment par une mise en ligne sur le site internet, lorsqu'il existe, des pouvoirs adjudicateurs et entités adjudicatrices mentionnés au premier alinéa.” ; ».Adopté par le Parlement le 20 juillet dernier (V. Le projet de loi « Climat et Résilience » est définitivement adopté), le projet de loi avait été déféré au Conseil constitutionnel (V. Loi « Climat et résilience » : 67 députés saisissent le Conseil constitutionnel en pointant l'inconstitutionnalité de certaines dispositions) qui a rendu sa décision le 13 août.Les auteurs de la saisine considéraient que, dans son ensemble, cette loi priverait de garanties légales le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé consacré par l'article 1er de la Charte de l'environnement car elle s'inscrirait « dans la spirale d'inaction ayant conduit au non-respect de la trajectoire de la France en matière de réduction des gaz à effets de serre ». Ils demandaient par conséquent au Conseil d'enjoindre au législateur de « prendre des mesures adéquates pour y remédier ». le Conseil a écarté le grief tiré de la méconnaissance de ces exigences constitutionnelles dans la mesure où les requérants n'ont visé aucune disposition particulière de la loi déférée, et n'ont développé qu'une critique générale de l'insuffisance de la loi prise dans son ensemble, ajoutant qu' « en tout état de cause, le Conseil constitutionnel ne dispose pas d'un pouvoir général d'injonction à l'égard du législateur ».Les requérants contestaient également l'article 215 de la loi modifiant le régime de l'autorisation d'exploitation commerciale afin de fixer les conditions dans lesquelles cette autorisation peut être délivrée lorsque les projets engendrent une artificialisation des sols. Pour les députés, ces dispositions instaurent une différence de traitement injustifiée entre les entreprises de commerce en ligne et celles exerçant une activité de commerce physique car elles ne sont pas applicables aux entrepôts des entreprises de commerce en ligne, y compris si leur implantation ou leur extension entraîne une artificialisation des sols. Le Conseil n'est pas de cet avis. Ces dispositions ne tendent qu'à introduire une nouvelle condition au régime de l'autorisation d'exploitation commerciale, lequel vise à assurer une répartition des surfaces commerciales afin de favoriser un meilleur aménagement du territoire. Elles ne créent par conséquent, aucune différence de traitement entre ces entreprises.Ont en revanche été censurés 14 articles considérés comme cavaliers législatifs, sans que la censure de ces dispositions ne préjuge de la conformité de leur contenu aux autres exigences constitutionnelles, précise le Conseil. Il s'agit des articles 16, 34, 38, 84, 102, 105, 152, 161, 168, 195, 204, 221, 235 et 255.Allégée de ces dernières dispositions, la loi « Climat et Résilience » a donc été publiée. Elle contient près de 300 articles, articulés notamment autour des cinq thèmes étudiés par la Convention citoyenne pour le climat : consommer, produire et travailler, se déplacer, se loger et se nourrir. Une centaine de décrets seront nécessaires pour la mise en œuvre de certaines mesures. Décryptage des mesures phares.Consommer. — Sur le modèle du « nutri-score », un « éco-score » sera rendu obligatoire, prioritairement pour les vêtements, à l'issue d'une phase d'expérimentation. Cette étiquette environnementale permettra de mieux informer le consommateur sur l'impact environnemental des produits et services. En outre, afin de lutter contre le gaspillage massif de papier, jusqu'à 15 collectivités territoriales volontaires pourront expérimenter, durant 36 mois, le dispositif « Oui pub » : seuls les foyers ayant affiché cette étiquette sur leur boîte aux lettres recevront de la publicité papier.À partir de mars 2022, l'affichage de l'impact climatique des produits sur les publicités sera obligatoire, l'application de cette mesure étant rendu immédiate pour les publicités de voiture et d'électroménager. En cours d'année 2022, la publicité sur les énergies fossiles sera interdite.Produire et travailler. — Le Sénat a introduit certaines mesures visant à soutenir l'hydroélectricité, l'hydrogène et le biogaz. L'article 86 complète l'article L. 100-4 du Code de l'énergie créer une obligation à la charge de l'État de tenir compte de l'objectif de sécurité d'approvisionnement et de l'objectif de réduire les émissions de gaz à effet de serre associées à la consommation d'énergie lorsqu'il prend la décision d'arrêter l'exploitation d'un réacteur nucléaire ayant pour finalité l'atteinte des objectifs de la politique énergétique nationale.En outre, diverses mesures concernent l'établissement d'une politique nationale des ressources et des usages du sous-sol pour une gestion minière
durable.Se déplacer. — D'ici le 31 décembre 2024, l'ensemble des agglomérations comprenant plus de 150 000 habitants devront mettre en place une zone à faibles émissions mobilité (ZFE-m), soit au total 33 nouvelles ZFE-m. Les 10 métropoles concernées par des dépassements réguliers de valeurs limites de qualité de l'air devront, quant à elle, appliquer une interdiction de circulation pour les véhicules Crit'air 5 en 2023, Crit'air 4 en 2024 et Crit'Air 3 en 2025. À partir de 2023, une expérimentation d'un prêt à taux zéro pour les ménages les plus modestes qui vivent dans des zones à faibles émissions (ZFE) sera menée, afin de leur permettre de financer l'achat d'un véhicule moins polluant.Parmi les mesures phares de ce volet, il faut également noter l'interdiction des vols intérieurs lorsqu'il existe une alternative en train en moins de 2 h 30, à l'exception des vols majoritairement empruntés par des passagers en correspondance vers une destination plus
lointaine.Se loger. — À partir de 2023, les propriétaires de passoires thermiques souhaitant augmenter le loyer de leur logement en location seront dans l'obligation de réaliser des travaux de rénovation énergétique, puis dès 2025, il sera interdit de louer les passoires thermiques les moins bien isolées (classées étiquette G), l'interdiction s'étendant aux passoires classées F dès 2028, et classées E dès 2034.En outre, appliquée à l'ensemble des collectivités territoriales, la loi ambitionne de diviser le rythme d'artificialisation des sols par deux d'ici 2030, pour atteindre zéro artificialisation nette d'ici
2050.Se nourrir. — Dans la continuité de l'expérimentation menée dans le cadre de la loi Egalim, les établissements scolaires devront obligatoirement proposer au moins un menu végétarien hebdomadaire.Parallèlement, dans le cadre de l'objectif de réduction des emballages, les commerces de plus de 400 m2 de vente devront consacrer 20 % de leur surface de vente à la vente en vrac d'ici à 2030.Renforcer la protection judiciaire de l'environnement. — La loi crée un délit de mise en danger de l'environnement : le fait d'avoir exposé l'environnement à un risque de dégradation durable (relève de cette définition les atteintes susceptibles de durer au moins sept ans) de la faune, de la flore ou de l'eau en violant une obligation de sécurité ou de prudence pourra être sanctionné de 3 ans d'emprisonnement et 250 000 € d'amende. Ces sanctions pourront s'appliquer y compris si la pollution n'a pas eu lieu, dès lors que le comportement s'est avéré dangereux.Elle crée en outre un délit général de pollution des milieux (flore, faune et qualité de l'air, du sol ou de l'eau) et délit d'écocide pour les cas les plus graves. Ainsi, les atteintes les plus graves commises intentionnellement à l'environnement seront passibles d'une peine maximale de 10 ans d'emprisonnement et 4,5 millions d'euros d'amende (22,5 millions d'euros pour les personnes morales), voire une amende allant jusqu'à dix fois le bénéfice obtenu par l'auteur du dommage commis à l'environnement.Le Ministère de la transition écologique a également publié un calendrier de mise en œuvre des mesures de la loi, allant du jour de la publication de la loi à 2034. Ainsi, sont applicables dès à présent les mesures suivantes :l'instauration de cours d'éducation à l'environnement et de menus végétariens hebdomadaires dans tous les établissements scolaires ;l'octroi aux maires du pouvoir d'encadrer les écrans publicitaires dans les vitrines ;le renforcement des sanctions pour atteintes au droit de l'environnement ;ainsi qu'un délit général de pollution des milieux ;la fin des centres commerciaux sur des territoires naturels ou agricoles.Barbara Pompili, Ministre de la Transition écologique, affirme que le Ministère de la Transition écologique est désormais concentré sur la prochaine étape : « prendre les décrets d'application au plus vite pour traduire concrètement les mesures du texte dans le quotidien des Français ».